Un petit enfant rapté,
Mille autres sous les missiles.
Du sang gicle dans le ciel,
Un garçon tremble de tout ses membres.
Son père est resté sous les décombres.
Un autre, hurle, puis hébété,
Cherche des yeux sa jambe amputée.
Un petit enfant rapté,
À perdu son biberon.
Une fille aux yeux couleur charbon,
Remarque une chevelure
Émergeant d’une tonne de pierres.
Elle reconnaît celle de sa mère,
Avale l’horreur à pleins poumons.
Un petit enfant rapté
Tète goulûment son vêtement.
On gémit devant le plat fumant,
Agrémenté de chiendent.
La viande est dure sous la dent.
Maintenant, c’est le chat du voisin,
Mais lequel mangera-t-on demain ?
Un petit enfant rapté,
Sanglote comme tout les bébés.
Une femme, seins gorgés de lait,
Agrippe son nourrisson, poupée
Au teint pâle comme la craie,
Minuscule corps en linceul blanc,
Qui n’aura respiré qu’un instant.
Un petit enfant rapté
Survit seul, affamé, plusieurs jours
Entouré d’étrangers morts,
Sous un tunnel de béton armé,
Avant d’être écrasé à son tour.
La bas, sa famille l’attend encore.
Filles, fils d’ennemis, tous, ils meurent.
Tout au sommet de sa tour,
Le muezzin prie toujours,
La voix hachée par les larmes.
D’autres affûtent leurs longues lames,
Pendant que, loins des gravats,
Les puissants s’arriment à leurs sofas,
Jouant leurs sièges échecs et mat.
© Isabelle Forestier